Marchés émergents
L’Inde vient de prendre la présidence du groupe des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) et en est devenue le pays le plus solide sur le plan des performances économiques, avec la croissance la plus forte et le contexte politique et d’investissement le plus lisible parmi ces cinq pays.
Depuis le 15 février, l’Inde préside, pour les 11 prochains mois, l’influent ensemble des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), qui pèse plus des deux cinquièmes de la population mondiale et totalise un Produit intérieur brut (PIB) de plus de 16 000 milliards de dollars.
Elle succède à la Russie dans le cadre de cette présidente tournante et doit accueillir chez elle le 8e sommet des BRICS cette année, après celui organisé en juillet 2015 dans la ville russe d’Oufa, dans l’Oural.
Que de chemin parcouru depuis que ce concept des BRIC, – complété ensuite par le « S » de l’Afrique du Sud, comme représentante d’un continent africain lui aussi en phase de croissance, – a fait son apparition dans les années 2000. Il a été forgé en 2001 par l’économiste Jim O’Neill, de la Banque d’affaires américaine Goldman Sachs, pour désigner les pays émergents appelés à devenir les mastodontes de l’économie mondiale, le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine.
A l’époque, les complémentarités sautaient aux yeux entre les pays riches en matières premières (Russie, Brésil), le géant industriel (la Chine) et celui des services (l’Inde). Mais depuis, le fonds dédié à ce véhicule d’investissement a fermé chez Goldman Sachs, faute de rendement, après avoir été cependant une mine d’or pendant près d’une décennie.
Il est vrai que tout n’est plus rose chez les BRICS et que seule l’Inde tire encore actuellement son épingle du jeu en matière de croissance et de perspectives d’investissement.
Le Brésil et la Russie pâtissent de l’effondrement des cours des matières premières, une source majeure de leur prospérité. En particulier, ces pays souffrent du ralentissement économique de la Chine, dont l’appétit pour les ressources naturelles se modère en conséquence.
Résultat, le Brésil et la Russie sont en récession marquée, plombés également par des problèmes politiques (scandales de corruption au Brésil, tensions géopolitiques entre la Russie et l’Europe ou les Etats-Unis, sur fond de crise en Ukraine et en Syrie).
L’Afrique du Sud n’est pas non plus au mieux, avec une croissance qui tourne autour 1%, autant dire une quasi-stagnation pour un pays dont la population progresse dans le même temps. Là encore, la dépression des cours des matières premières pèse sur les comptes, en déficit marqué, tant au niveau du budget public que du solde de la balance courante.
De même, le contexte politique et social ne plaide pas pour un horizon d’investissement serein en Afrique du Sud. Le pays reste marqué par des dissensions politiques, des scandales de corruption, une forte criminalité, ainsi que par un chômage élevé et des inégalités marquées.
La Chine connaît un ralentissement économique et croît désormais à un rythme plus lent que l’Inde.
Le point sur le « I
Reste l’Inde, bon élève économique de l’ensemble, avec plus de 7% de croissance annuelle, une ouverture économique grandissante aux investissements, notamment étrangers, et une dynamique de rattrapage toujours à l’oeuvre.
L’agence de notation Moody’s anticipe une croissance de 7,5% en 2016 et 2017 en Inde. L’Inde va profiter, selon elle, de la baisse des prix des matières premières et devrait limiter son exposition aux facteurs négatifs externes tels que le ralentissement économique chinois.
Elle prévient cependant que des éléments négatifs restent à l’œuvre, comme l’assainissement à poursuivre du bilan des banques et la dette élevée des entreprises ; elle note aussi la pression persistante sur les consommateurs, notamment dans les zones rurales, du fait de l’inflation des prix alimentaires et de la sécheresse.
Il n’empêche, le paysage économique indien, même s’il a ses fragilités et s’il dépend aussi de la conjoncture mondiale morose, reste plus lisible pour investir, comparé à celui des autres BRICS.
Le schéma de rattrapage en matière de dépenses de consommation reste soutenu par une démographie solide, dans un pays jeune. L’inflation est relativement modérée, dans la droite ligne de l’objectif de 5% défini par la Reserve Bank of India, la Banque centrale indienne, présidée par Raghuram Rajan, dont la compétence et la vision, mondiale et prudente, sont louées par ses pairs. Sans oublier des investissements en hausse, notamment les Investissements Directs Etrangers (IDE); et une augmentation des salaires de plus de 20% décidée dans le secteur public.
L’Inde, ou le plus solide des pays BRICS, qui auraient bien besoin de cimenter une vraie cohérence économique.